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"Elles vivaient d’espoir" dans Artpress de décembre 2010
jeudi 9 décembre 2010, par
C’est sous la patte d’une colombe que se dépose la vérité, disait Nietzsche. Il est des livres qui vous l’apportent, la vérité, sans faire plus de bruit que le vol et la marche d’une colombe. En voici un, laissé inaperçu, qui a la grâce, profondément bouleversant : Elles vivaient d’espoir, de Claudie Hunzinger.
Elles, ce sont deux très jeunes femmes, Emma et Thérèse, deux enseignantes qui, dans la première moitié du siècle passé, vivent une passion amoureuse, alors que leur pays s’apprête à connaître la tragédie d’une nouvelle guerre mondiale. Les nominations dans des postes de petites villes de province les obligent à souvent vivre leur amour par correspondance. Beauté de ces lettres entre deux femmes libres (leur courage d’affirmer une telle passion homosexuelle dans les années 1930). et du journal tenu par l’une d’elles, Emma, laquelle est amenée à se demander : "Faut-illimiter nos rêves à nos deux vies ou les étendre à d’autres, à tous les autres ?". La guerre va séparer les deux femmes. Chacune répondra à sa façon à la question : comment et qui aimer ? Un être particulier ou l’humanité ? Emma se marie avec un Alsacien qui se compromet avec l’occupant nazi. Thérèse s’engage sans la Résistance, est arrêtée par la Gestapo, atrocement torturée et massacrée le 26 octobre 1943. Thérèse s’appelait Thérèse Pierre. Une plaque a été apposée portant son nom à l’entrée de l’école primaire supérieure de Fougères. Emma s’appelait Emma Hunzinger. C’était la mère de l’auteur. Claudie Hunzinger a retrouvé les cahiers et les lettres de celle-ci. Cet extrait du dernier cahier : "Il y a dans la vie des temps qui se succèdent comme dans une tragédie. C’est par la dévastation de moi-même que je me suis finalement construite."
Jacques Henric